Thèse de François Bouchaud

Analyse forensique des écosystèmes intelligents communicants de l'Internet des objets

Avec le développement des écosystèmes connectés à Internet, la recherche de données dans un environnement numérique par l’enquêteur judiciaire constitue une tâche de plus en plus ardue. Elle est un véritable défi en particulier par l’hétérogénéité des objets à étudier. A cette affirmation, il convient d'y ajouter l’absence de standardisation des architectures de communication et des remontées de données, des dépendances entre les dispositifs connectés et une dispersion de l’information. Dans cette thèse, nous proposons d’adapter l’approche traditionnelle de l’investigation numérique aux contraintes de l’Internet des objets. Nous développons des méthodologies et des outils d’appréhension et d’analyse de l’environnement connecté pour les praticiens du judiciaire. Nous partons du principe que la scène de crime constitue un tout connecté et non un agrégat d’objets numériques. Elle contient des données clefs dans la compréhension et la contextualisation d’un évènement ou d’un phénomène passé, éléments de preuve pour le procès pénal. L’investigation numérique est une science appliquée pour identifier un incident, collecter, examiner et analyser des données tout en préservant l’intégrité de l’information et en maintenant une chaîne de contrôle stricte pour les données (National Institute of Standards and Technology). Face à une scène de crime, l’enquêteur cherche à comprendre l’évènement criminel, en examinant les traces figées ou emprisonnées dans le support physique et/ou dans une partie déportée sur le Cloud. Nos travaux développent un processus d’identification rapide du phénomène selon quatre phases : détection, localisation, reconnaissance des objets et recoupement de l’information. Il est enrichi d’outils de recherche de traces radioélectriques: simple capteur et réseau maillé multi-capteur. Cette démarche est construite autour de la problématique de l’appréhension d’un environnement connecté multiforme, contenant des dispositifs pas toujours visibles ou identifiables lors d’une approche terrain. Nous intégrons dans notre étude la stratégie de la collecte des équipements. Le défi réside dans la capacité à extraire un ou plusieurs objets connectés, sans compromettre les données stockées, pour les placer dans un environnement contrôlé et sécurisé. L’objet est maintenu dans un état garantissant la non-altération ou la perte des données. L’étude regroupe une première phase de compréhension de l’environnement physique et des dépendances. Elle cherche à déterminer les mécanismes de migration de l’information vers les plates-formes en ligne et à isoler les groupes d’objets en déstructurant avec intelligence les connexions. Les dispositifs sont extraits, puis conditionnés et scellés au regard de leurs caractéristiques techniques et de l’infrastructure connectée. Puis, nous approfondissons l’exploitation de l’information collectée par des méthodes forensiques. La donnée est alors analysée selon les axes temporels, spatiaux et contextuels. Nous proposons par ailleurs une classification et une priorisation de la structure connectée en fonction des caractéristiques de la donnée recherchée. Les travaux donnent une lecture du cycle de vie de la donnée au sein de l’infrastructure de l’Internet des Objets. Dans une approche prospective, nous approfondissons les questions de l’identification fine de l'objet connecté en fonction des caractéristiques du matériel et du logiciel. L'émission acoustique de l'électronique apparaît comme une propriété physique pertinente dans l'étude des équipements. Cet attribut complète notre palette d'outils dans l'identification des objets connectés.

Jury

M. Gilles GRIMAUD Université de Lille Directeur de thèse M. Issa TRAORE Université de Victoria Rapporteur Mme Anne-Cécile ORGERIE IRISA Rapporteure M. Thomas VANTROYS Université de Lille Examinateur Mme Nathalie ROLLAND IRCICA Examinatrice M. David BILLARD Université des Sciences Appliquées de Genève Examinateur M. Marc WATIN-AUGOUARD CREOGN Invité

Thèse de l'équipe 2XS soutenue le 30/01/2021